7. Prévenir la pollution pour parvenir à des mers propres
L'obtention de mers saines est une ambition majeure pour les Parties contractantes d'OSPAR. Il s’agit là d’un immense défi dans l’Atlantique du Nord-Est, car dans cet océan très fréquenté, la pollution est présente sous de nombreuses formes et provient d’une multitude de sources. OSPAR évalue les principaux groupes de polluants, y compris la pollution par les nutriments conduisant à l’eutrophisation, les substances dangereuses, les substances radioactives, les déchets marins, la pollution sonore marine et l’introduction d’espèces non indigènes (ENI), qui est une forme de pollution biologique.
Polluant surveillé par les parties contractantes OSPAR avec lien vers les sources de données, y compris des liens vers plusieurs flux de données gérés en externe
Teneurs en métaux lourds dans le biote et les sédiments HAP dans le biote et les sédiments
PCB dans le biote et les sédiments PBDE dans le biote et les sédiments
TBT dans le biote et les sédiments Pertes de mercure provenant de l’industrie de l’électrolyse des chlorures alcalins*
Apports de métaux lourds Apports de nutriments Bruit
Déchets ingérés par les tortues de mer Surveillance des déchets sur les plages
Particules plastiques dans l’estomac des oiseaux de mer Déchets sur le sol marin
Immersion et placement des déchets et autres matériaux en mer (matériaux de dragage)
Rejets liquides des installations nucléaires Rejets des radionucléides des secteurs non-nucléaires
Concentrations de substances radioactives dans l’eau de mer et le biote
Rejets, déversements et émissions provenant des installations pétrolières et gazières offshore
*La surveillance a cessé en 2019 lorsque toutes les installations des chlorures alcalins utilisant des électrolyseurs à mercure dans la zone maritime OSPAR ont été progressivement supprimées suite à la mise en œuvre intégrale par les Parties contractantes de la Décision PARCOM 90/3 sur la réduction des émissions atmosphériques des installations existantes d’électrolyse des chlorures alcalins.
Les Parties contractantes d'OSPAR ont réalisé des progrès tangibles dans la réduction de toutes les formes de pollution, cependant les progrès sont variables, en fonction des polluants et des Régions. La réduction de toutes les formes de pollution pour parvenir à des mers propres est un objectif stratégique fondamental d’OSPAR, et a donné l’impulsion initiale à la création des Conventions d’Oslo et de Paris qui ont précédé la Convention OSPAR (1992) [À propos de | La Commission OSPAR]. Toutefois, malgré les progrès réalisés sur ce front depuis la dernière évaluation (QSR 2010), qui sont quantifiés dans le QSR 2023, il reste encore beaucoup à faire avant que l’objectif de parvenir à des mers propres ne soit atteint.
Les différentes classes de pollution sont évaluées individuellement. En ce qui concerne les activités pétrolières et gazières, le QSR 2023 présente en détail les progrès considérables réalisés dans l’industrie pour limiter la pollution, qui se traduisent par une diminution des rejets et des émissions, entraînant une réduction des niveaux de contamination ( Évaluation thématique concernant l'industrie de l'offshore ). Une approche basée sur le risque a également été introduite pour la gestion des rejets d’eau de production – la principale source de contamination par le pétrole brut en mer –, en complément du Système obligatoire et harmonisé de contrôle de l'utilisation des produits chimiques en offshore d'OSPAR, et pour promouvoir le passage à l’utilisation de substances moins dangereuses ( Évaluation thématique concernant l'industrie de l'offshore ). De même, les Parties contractantes ont considérablement avancé vers la réalisation du but d'OSPAR consistant à atteindre des concentrations dans l’environnement qui sont proches des valeurs ambiantes pour les substances radioactives naturelles, et proches de zéro pour les substances radioactives artificielles ( Substances radioactives : Évaluation thématique ). À l’avenir, OSPAR se consacrera en particulier à mieux comprendre les effets cumulatifs des différentes pressions et les liens entre le changement climatique et les substances radioactives dans la zone maritime d'OSPAR.
La pollution de la zone maritime d'OSPAR par un large éventail de substances dangereuses, par l’excès de nutriments (conduisant à l’eutrophisation) et par les déchets marins n’a pas été entièrement résolue. On a cependant vu des réductions des rejets de substances dangereuses du secteur pétrolier et gazier et des rejets de substances radioactives du secteur nucléaire. Le QSR 2023 montre que les concentrations de bon nombre des substances dangereuses les plus préoccupantes, telles que les PCB, les HAP et les insecticides organochlorés ont considérablement diminué par rapport aux années 1980 et 1990 ( Substances dangereuses : Évaluation thématique ). L’interdiction en 2008 du tributylétain (TBT) dans les peintures antifouling a également entraîné une baisse des niveaux de TBT dans les zones côtières. Cependant, la plupart des sous-régions d'OSPAR (10 sur 12) dans la zone maritime d'OSPAR sont dans un état médiocre en ce qui concerne la présence de substances dangereuses dans les espèces indicatrices marines, le mercure et le PCB 118 en étant les principaux responsables. Quoi qu'il en soit, dans la plupart des Régions, les concentrations de mercure sont inférieures aux teneurs maximales fixées par la Commission européenne pour les denrées alimentaires, tandis que pour le PCB 118, aucune teneur maximale n’a été adoptée par la Commission européenne. En outre, d'après les tendances actuelles, une seule des sous-régions pourrait s'améliorer sensiblement au cours des 10 à 20 prochaines années. Le manque de progrès vers l’objectif de mettre fin à la pollution par les substances dangereuses est en partie dû à une nouvelle libération ou à une bioaccumulation de composés à longue durée de vie, ce qui signifie que bon nombre de ces substances sont des polluants du passé. En ce qui concerne les substances dangereuses présentes dans les sédiments, la situation est un peu meilleure, car plusieurs sous-régions d'OSPAR sont en bon état.
Les Parties contractantes d'OSPAR ont considérablement réduit les quantités de nutriments qui parviennent au milieu marin, en particulier ceux provenant de sources agricoles, des eaux usées, et de sources industrielles et atmosphériques. Cela a conduit à des améliorations dans les Régions d'OSPAR les plus touchées ; cependant, l’eutrophisation persiste dans les panaches fluviaux et dans certaines zones côtières, et l’augmentation des apports de nutriments dans la Région Eaux arctiques suscite des inquiétudes ( Eutrophisation : Évaluation thématique ). La situation pour les déchets marins est tout aussi mitigée : les quantités de déchets marins dans la zone maritime d'OSPAR restent élevées, bien qu’il y ait eu des diminutions ( Déchets marins : Évaluation thématique ). Dans la plupart des Régions d'OSPAR, on a vu une diminution des déchets macroplastiques sur les plages, ainsi qu'une diminution des déchets flottants dans certaines Régions. Cependant, les déchets sont largement répandus sur le fond marin ; il s'agit essentiellement de matériel de pêche et de matières plastiques.
Les forces motrices qui influencent la pollution
Les systèmes de production alimentaire sont l’une des principales forces motrices de la pollution marine. Dans la majorité des pays d'OSPAR, les terres sont consacrées principalement à l’agriculture, et cette utilisation peut impacter les systèmes marins, par des apports de nutriments (azote et phosphore) dans le milieu marin par l'intermédiaire des eaux de ruissellement, responsables de l’eutrophisation ( Activités humaines : Évaluation thématique ). Les apports d’autres substances (par exemple des substances synthétiques, des substances non synthétiques, des médicaments) proviennent de sources diffuses, de sources ponctuelles, de retombées atmosphériques et d’événements aigus. Les pesticides sont régulièrement utilisés en agriculture dans l'ensemble des pays d'OSPAR, et ils sont parfois détectés dans les systèmes aquatiques à cause du ruissellement, en particulier celui qui provient des terres arables. Bien que des procédures réglementaires soient en place pour régir l'utilisation des pesticides et qu'on ait réussi à faire retirer certaines substances du marché, des préoccupations demeurent, des études ayant pointé les effets négatifs potentiels des pesticides sur les écosystèmes marins. La production alimentaire marine – pêches et aquaculture – contribue également aux pressions exercées par la pollution ( Activités humaines : Évaluation thématique ). L’aquaculture peut être à l'origine de rejets de nutriments, de déchets et de substances dangereuses, et pourrait contribuer à la dissémination accidentelle d’espèces ou de génotypes non indigènes. Les pêches contribuent à la pollution en produisant des émissions de diesel ou d’autres carburants, des déchets de transformation du poisson et des déchets d’emballage, et car des engins de pêche sont perdus en mer. Tous les systèmes de production alimentaire peuvent contribuer à l’apport de déchets et de contaminants, en particulier sous forme de plastiques et de microplastiques, provenant non seulement de la production, mais aussi de la transformation et du commerce ( Déchets marins : Évaluation thématique ).
Le développement énergétique reste une force motrice des activités et des pressions créées par celles-ci. Le secteur pétrolier et gazier contribue aux pressions exercées par la pollution, mais ces pressions ont suivi une tendance à la baisse ( Évaluation thématique concernant l'industrie de l'offshore ). La production d’hydrocarbures dans la zone maritime d'OSPAR a diminué de 28 % entre 2009 et 2019, quoiqu'elle ait augmenté entre 2014 et 2016 avant de se stabiliser. Les activités de forage ont diminué en Irlande, aux Pays-Bas et au Danemark, tandis qu’en Norvège et au Royaume-Uni, elles sont restées relativement stables au cours de cette période. La pression exercée par les activités pétrolières et gazières offshore est la plus forte dans la Région Mer du Nord au sens large, suivie des Régions Eaux arctiques et Mers celtiques. La tendance à la baisse de la production devrait se poursuivre, et on prévoit une intensification des activités de déclassement au cours de la prochaine décennie, à mesure que les installations plus anciennes atteindront leur fin de vie.
Le transport maritime et le tourisme répondent aux besoins de la société en matière de commerce et de loisirs, et contribuent également à la pollution marine. Ces deux secteurs sont en croissance dans certaines parties de la zone maritime d'OSPAR ( Activités humaines : Évaluation thématique ). La disparition de la glace de mer dans les eaux arctiques va probablement déclencher une intensification de l'utilisation de cette Région relativement peu polluée, en particulier par le transport maritime, à mesure que de nouvelles voies maritimes s'ouvriront à travers le pôle. Compte tenu de la sensibilité de nombreux écosystèmes marins polaires et de l’effet cumulatif du changement climatique dans la Région, il pourrait être nécessaire d’étendre la surveillance des effets de la pollution, y compris ceux du sous-secteur des énergies renouvelables offshore.
Enfin, la production, l’utilisation et l’élimination des plastiques ont une incidence sur la propreté de l’Atlantique du Nord-Est, et cette force motrice influence la mesure dans laquelle les Parties contractantes d'OSPAR peuvent réduire les déchets marins. La production de matières plastiques en Europe et la demande des transformateurs (fabricants de produits en plastique) ont légèrement augmenté entre 2010 et 2019, ce qui contraste quelque peu avec l’attention accrue portée aux déchets en général et avec l’élargissement des réglementations en matière de gestion des déchets. Pour assurer une diminution des niveaux de déchets marins alors même que la production et l’utilisation des plastiques augmentent, le Plan d’action régional d'OSPAR pour la prévention et la gestion des déchets marins (PAR-ML) de 2014 comprenait des engagements à attirer l'attention sur les pratiques de prévention et de gestion des déchets qui ont un effet significatif sur les déchets marins, à encourager la recyclabilité et la réutilisation des produits en plastique, à évaluer des instruments visant à réduire l'utilisation d'articles à usage unique, et à réduire les apports de microplastiques. OSPAR continuera d'agir sur les sources de déchets marines et terrestres par le biais de son nouveau Plan d'action régional pour la prévention et la gestion des déchets marins (PAR-ML 2), qui a été adopté en 2022.
Pressions exercées par la pollution touchant la zone maritime d'OSPAR
Nutriments et eutrophisation
L’eutrophisation résulte de l'introduction d’un excès de nutriments dans les milieux aquatiques, qui stimule la croissance des algues (phytoplancton), des macroalgues et des plantes, entraîne des modifications de l’équilibre naturel de l’écosystème et de sa biogéochimie, et provoque une dégradation de la qualité de l’eau. La décomposition des algues et des matières végétales par les microbes fait augmenter la consommation d’oxygène dans les eaux de fond, ce qui peut conduire à une hypoxie (réduction de la teneur en oxygène de l’eau) ; celle-ci provoque alors une détérioration des habitats marins et une perte de biodiversité, ainsi que des réductions de la qualité et de la quantité de nombreux services écosystémiques.
L’objectif stratégique d’OSPAR en matière d’eutrophisation consiste à lutter contre l’eutrophisation en limitant les apports de nutriments et de matières organiques à des niveaux qui n’entraînent pas d’effets néfastes pour le milieu marin ( Eutrophisation : Évaluation thématique ). Les apports de nutriments dans l’environnement proviennent du ruissellement agricole, des émissions atmosphériques, et des rejets directs associés aux utilisations industrielles et au traitement des eaux usées municipales. Les émissions atmosphériques provenant de la combustion liée au transport maritime et de sources industrielles, ainsi que les retombées qui s'ensuivent, constituent une autre voie d’apport de nutriments. L’aquaculture libère des nutriments par le biais des matières fécales et des aliments non consommés. Le dragage des fonds marins peut aussi libérer des nutriments dans la colonne d’eau.
Dans le cadre de la lutte contre l’eutrophisation anthropique, la Stratégie Eutrophisation pour la période de 2010 à 2020 a fait fond sur l’engagement des Parties contractantes à parvenir à une réduction substantielle à la source. Le seuil de réduction des apports de phosphore et d’azote est de l’ordre de 50 % par rapport à 1985, et il est appliqué dans des « zones à problème » où ces apports sont susceptibles, directement ou indirectement, de causer une pollution. Afin d’aider les Parties contractantes à identifier ces zones de manière cohérente, OSPAR a élaboré un cadre d’évaluation commun (la Procédure commune), qui a été régulièrement mis à jour. L’évaluation de l’eutrophisation qui a été réalisée pour le QSR 2023 est différente de celles des rapports précédents, car elle est plus cohérente et mieux harmonisée.
En ce qui concerne les émissions atmosphériques, la combustion des combustibles fossiles est une source majeure d’azote oxydé, qui est ensuite transformé dans l’atmosphère en acide nitrique, puis déposé par les précipitations sous forme de nitrate. Les apports atmosphériques d’azote représentent environ 40 % de l’azote total pénétrant dans la zone de la Convention OSPAR ( Autre évaluation : Apports aquatiques et atmosphériques de nutriments et de métaux dans la mer ). Les émissions directes provenant de l’élevage sont une source majeure d’ammoniac. Le transport atmosphérique de celui-ci est un processus rapide et efficient, ce qui lui permet de parvenir à l’océan ouvert en quelques jours, beaucoup plus vite et plus efficacement que par le biais des apports fluviaux.
Les quatre dernières évaluations ont fait état d'une amélioration constante de l’état d’eutrophisation de trois Régions d'OSPAR (Mer du Nord au sens large, Mers celtiques et Golfe de Gascogne et côte ibérique). La première évaluation, couvrant la période de 1990 à 2000, a été caractérisée par un état médiocre dans une grande partie de la mer du Nord ( QSR 2000 ). La dernière évaluation, réalisée pour le présent QSR 2023, indique la présence de zones où l'état est moyen, à l'extérieur des estuaires de la Loire et de la Seine, le long des côtes néerlandaises et allemandes, dans l’est de la mer du Nord et dans les grands fonds du Kattegat, tandis que l'état est médiocre dans les zones côtières du Kattegat et dans le panache de l’Elbe ; aucune zone n’a été jugée en mauvais état. Cette amélioration s’explique par les tendances des apports de nutriments. Les stations d'épuration et les sources ponctuelles industrielles ont réduit leurs rejets d’azote ainsi que de phosphore. Les apports fluviaux de phosphore ont considérablement diminué, tout comme les apports atmosphériques d’azote. Les apports d’azote par voie hydrique n’ont pas diminué autant. Les apports dans l’Arctique, principalement ceux qui proviennent de la pisciculture, ont considérablement augmenté. Cependant, en raison du manque de données et de l'absence de seuils, il n’a pas été possible d’évaluer l’eutrophisation dans la Région Eaux arctiques pour le QSR 2023.
Figure 7.1 : Résultants des évaluations de l’eutrophisation pour toutes les périodes d’évaluation – COMP1 (1990-2000), COMP2 (2001-2006), COMP3 (2006-2014) et COMP4 (2015-2020) couvrant une période de 30 ans.
Les améliorations les plus spectaculaires ont été obtenues avec la réduction des apports atmosphériques d’azote et de l’utilisation d’engrais depuis 1990. Les retombées atmosphériques d’azote, qui s’étendent loin des côtes, se déposent directement sur les eaux de surface productives et sont entièrement biodisponibles ; elles représentent environ un tiers à la moitié de l’apport d’azote dans les Régions Mer du Nord au sens large, Mers celtiques, et Golfe de Gascogne et côte ibérique. Dans la Région Eaux arctiques, la composante atmosphérique représente environ 75 % de l’apport total d’azote ; l'application et la révision du Protocole de Göteborg de la Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance (CLRTAP) et l’intégration de ces cibles dans des directives de l’UE et une législation nationale juridiquement contraignantes ont permis de réduire cet apport ( Eutrophisation : Évaluation thématique ). Grâce à la transition vers une réduction des processus impliquant une combustion dans la production d’électricité, les transports, le chauffage et la cuisson, on a pu atteindre les cibles fixées pour les émissions et réduire les apports d’azote en mer dans cette Région.
Figure 7.2 : Séries chronologiques des retombées d’azote oxydé (en bleu) et d'azote réduit (en orange) dans toutes les Régions d'OSPAR, indiquant de faibles réductions des retombées d’azote réduit (ammonium) par comparaison avec l’azote oxydé (d'après Gauss et al., 2020).
L’une des conclusions frappantes du QSR 2023 a été le grand essor de l’aquaculture dans la zone maritime d'OSPAR. Les chiffres disponibles pour la production aquacole dans l’Atlantique du Nord-Est montrent que celle-ci a augmenté d’environ 1,5 Mt en 2008 à environ 2,2 Mt en 2018 (dont environ 1,68 Mt de poissons à nageoires et 0,54 Mt de mollusques). En 2018, plus de 1,35 Mt de la production (d’une valeur de plus de 6,7 milliards d’euros en 2018) venait de Norvège ; il s'agissait principalement de saumon, la denrée la plus importante dans le commerce mondial du poisson et des produits de la pêche, la production suivant la demande sur les marchés développés et en développement. Le Royaume-Uni et les îles Féroé se sont classés en deuxième place pour la production de saumon ( Activités humaines : Évaluation thématique ). Les apports notifiés provenant de l’aquaculture ont considérablement augmenté depuis 1990 ( Autre évaluation : Apports aquatiques et atmosphériques de nutriments et de métaux dans la mer ).
L’aquaculture est maintenant la principale source d’apports directs de nutriments dans la zone maritime d'OSPAR, et elle apporte à peu près autant d’azote que l’industrie et les eaux usées combinées. Les apports de phosphore provenant de l’aquaculture dépassent ceux de toutes les autres sources ponctuelles. En raison de la croissance de l’aquaculture, les rejets directs totaux d’azote dans la zone maritime d'OSPAR n'ont pas diminué entre 1990 et 2019 et les apports de phosphore n’ont diminué que d’environ un sixième, alors que les apports de l’industrie et des stations d'épuration ont diminué de deux tiers depuis 1990. Notons que les apports issus de l’aquaculture pourraient être sous-estimés, car les Parties contractantes n’ont pas toutes notifié les intrants aquacoles de tous leurs territoires, et l’aquaculture est en train de s’étendre à des zones auparavant épargnées, où un excès de nutriments peut avoir des impacts écologiques importants.
En résumé, bien que l’ampleur de l’eutrophisation dans la zone maritime d'OSPAR ait continué de diminuer depuis 1990, l'eutrophisation y reste un problème. L’Arctique a été la seule Région à afficher des augmentations significatives des apports de nutriments par voie hydrique, dû à la croissance de l’industrie de l’aquaculture. Cependant, comme l’évaluation de l’eutrophisation n'a pas couvert la Région Eaux arctiques pour des raisons techniques, il est impossible de déterminer si la forte augmentation des apports de nutriments est en train de provoquer une eutrophisation. Dans d’autres Régions d'OSPAR, l’eutrophisation reste en évidence, en particulier dans certaines zones sensibles, notamment la côte sud-est de la Région Mer du Nord au sens large et des zones localisées de la Région Mers celtiques.
Substances dangereuses
Un grand nombre de substances dangereuses très diverses sont rejetées dans l’environnement par des activités industrielles et d'autres activités humaines ; ces substances peuvent non seulement être à l'origine de pressions locales, mais aussi contribuer à la charge totale de polluants. OSPAR étudie les apports de substances dangereuses et leurs effets sur les écosystèmes marins, en mettant l’accent sur les métaux lourds toxiques (arsenic, cadmium, chrome, cuivre, plomb, mercure, nickel et zinc), les composés organostanniques tels que le tributylétain (TBT) et les polluants organiques persistants tels que les polybromodiphényléthers (PBDE), les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), les polychlorobiphényles (PCB) et les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS). Des substances dangereuses connues pénètrent dans la zone maritime d'OSPAR par le biais d’un certain nombre d’activités humaines, notamment les modifications des cours d’eau (remise en suspension de sédiments contaminés), le déversement de sédiments dragués, l’extraction minière, l’extraction de pétrole et de gaz, la pêche et la transformation du poisson et des mollusques et crustacés, l’aquaculture, le transport maritime (responsable entre autres de pollution atmosphérique et de rejets dans l’eau de mer), le transport aérien, le transport terrestre, l’urbanisation, les rejets industriels, le dessalement, ainsi que le traitement et l’élimination des déchets. Les voies d'apport comprennent donc les rejets en mer, les apports fluviaux, le ruissellement à partir des terres et les retombées atmosphériques.
Les activités humaines contribuent collectivement à la présence de substances dangereuses dans l’eau de mer, les sédiments et le biote. Les contaminants entraînent une dégradation de la qualité de l’eau, avec les pertes que ceci implique pour la société (ayant pour effets, entre autres, une diminution de la valeur écologique et économique des ressources marines et des moyens de subsistance qui en dépendent, une baisse des valeurs esthétiques, et des impacts sur l'écotourisme et le tourisme). Les effets cumulatifs des contaminants sur les organismes marins peuvent entraîner des changements du comportement, une réduction de la condition physique des espèces, une réduction du succès de reproduction et une mortalité. Ces effets ont à leur tour un impact sur la structure des réseaux trophiques, en entraînant un déclin des services d’approvisionnement et de régulation, ce qui porte encore plus atteinte au bien-être humain.
Dans la plupart des cas, les tendances des substances organiques dangereuses évaluées sont à la baisse, et la plupart des Régions d'OSPAR voient également une baisse de la pollution par les métaux lourds. Dans certains points chauds, les concentrations dans les poissons ont été divisées par 1 000 depuis les années 1970. Au cours des deux dernières décennies, les tendances à la baisse ont été moins marquées qu’au cours des décennies précédentes, les baisses durant ces périodes résultant de l’élimination de sources ponctuelles importantes de contamination par le secteur industriel. La plupart des métaux suivent des tendances identiques, cependant dans les Régions d'OSPAR les plus peuplées (la Région Mer du Nord au sens large, et les zones situées dans l'est des Régions Mers celtiques et Golfe de Gascogne et côte ibérique), on voit des tendances à la hausse à certains endroits pour certaines substances comme le mercure. Dans certaines zones, on observe des hausses importantes des tendances pour les substances présentes dans le biote, ou de la tendance générale de l’état de pollution (par exemple dans la mer du Nord méridionale). Aucune tendance à la baisse n’a été observée dans la mer du Nord septentrionale, la Manche ou le Golfe de Gascogne septentrional, qui se trouvent encore dans un état « pas bon ». L’état de l’environnement en ce qui concerne les substances dangereuses est médiocre dans les régions à forte densité de population et très industrialisées, notamment à cause de la contamination par le mercure et les PCB ( Une évaluation pilote de la présence de polluants organiques persistants (polychlorobiphényles ou PCB ).
L’objectif d’OSPAR consistant à réduire continuellement les rejets, les émissions et les pertes a été partiellement atteint. Les interdictions de l’utilisation et les conventions limitant l’utilisation de certains métaux (Convention de Minamata sur le mercure) et polluants organiques persistants (Convention de Stockholm), ainsi que les initiatives et lignes directrices d’OSPAR et les réglementations européennes et nationales relatives aux substances dangereuses, ont toutes contribué à faire diminuer les niveaux de substances dangereuses, toutefois ces diminutions ne se produisent pas uniformément dans l’ensemble de la zone maritime d'OSPAR. OSPAR s’est donc rapprochée de la cible de cessation pour 2020 sans toutefois l’atteindre. Les objectifs ont été partiellement atteints pour de nombreux contaminants du passé, tels que les PCB et les PBDE, de nombreuses séries chronologiques présentant des tendances à la baisse et quelques-unes présentant des tendances à la hausse. Alors que les concentrations de substances dangereuses dans l’environnement sont en diminution, les niveaux accumulés dans les populations de mammifères restent très élevés. Néanmoins, des analyses indiquent que les apports atmosphériques et fluviaux de mercure sont en diminution, une situation qui se reflète aussi dans la diminution des concentrations de mercure dans les sédiments, mais pas dans les poissons, les mollusques et les crustacés, pour lesquels la majorité des tendances sont à la hausse ( Autre évaluation : Apports aquatiques et atmosphériques de nutriments et de métaux dans la mer ).
Pressions exercées par les activités pétrolières et gazières
Le secteur pétrolier et gazier est responsable d'une des exploitations industrielles les plus intenses du milieu marin dans la zone maritime d'OSPAR, et il peut contribuer aux pressions exercées par la pollution lors d’opérations courantes et en cas de déversements d’hydrocarbures. Des études entreprises par les Parties contractantes d'OSPAR portant sur un large éventail de pressions pouvant être exercées par les activités pétrolières et gazières, entre autres les tas d'anciens déblais de forage, les rejets d'eau de production, les fluides de forage et les produits chimiques, montrent qu’il y a eu une diminution des émissions et des rejets. Des impacts autrefois très répandus, résultant par exemple de rejets de déblais de forage à base d'hydrocarbures non traités, ont maintenant cessé et le niveau de contamination a diminué dans la majeure partie de la zone maritime d'OSPAR. Quand il reste des possibilités d'impacts, ceux-ci ont été réduits, par exemple la quantité d'hydrocarbures dispersés rejetée dans l'eau de production, et il y a aussi eu une élimination progressive des rejets de produits chimiques ajoutés devant faire l'objet de mesures prioritaires (OSPAR de produits devant faire l’objet de mesures prioritaires), et une réduction des rejets de produits chimiques d'offshore dangereux.
Les pressions exercées par le secteur pétrolier et gazier peuvent potentiellement impacter l’écosystème marin de diverses manières. Les rejets d’eau de production et de produits chimiques peuvent exposer les poissons et d'autres organismes pélagiques à des contaminants, la construction de pipelines et d’installations, les rejets de déblais et la perturbation des tas de déblais peuvent avoir un effet négatif localisé et temporaire sur les organismes benthiques, le bruit des études sismiques peut potentiellement nuire aux poissons et aux mammifères marins, et l'éclairage des plates-formes et le brûlage à la torche peuvent avoir un impact sur les oiseaux migrateurs.
Le QSR 2023 indique que depuis 2009, une réduction de 16 % des hydrocarbures dispersés rejetés dans l’eau de production a été obtenue grâce à l’application des normes énoncées dans la Recommandation OSPAR 2001/1 relative à la gestion de l’eau de production des installations offshore, telle qu’amendée. Il y a eu une diminution du nombre d’installations dépassant les limites agréées pour les hydrocarbures dispersés dans l'eau de production rejetée en mer. L’élimination progressive des rejets de produits chimiques ajoutés devant faire l’objet de mesures prioritaires et la réduction de près de 50 % de l’utilisation et des rejets de substances visées par des avertissements concernant la substitution ont été réalisées grâce aux Recommandations OSPAR fixant des objectifs environnementaux pour les rejets par l’industrie de l’offshore. Ces progrès résultent largement de la mise en œuvre d'une approche basée sur le risque pour gérer les rejets d’eau de production, y compris les substances naturelles. L’approche basée sur le risque a été introduite en complément du Système obligatoire et harmonisé de contrôle de l'utilisation des produits chimiques en offshore d'OSPAR, et pour promouvoir le passage à l’utilisation de substances moins dangereuses. À ce jour, les évaluations ont déterminé que 54 % des installations contrôlent leurs rejets de manière adéquate et 39 % nécessitent des actions supplémentaires, les autres étant encore en cours d’évaluation.
Les Parties contractantes sont convenues d’interdire l’immersion des installations offshore désaffectées dans la zone maritime d'OSPAR, conformément à la Décision OSPAR 98/3 sur l'élimination des installations offshore désaffectées. Depuis 1998, environ 170 installations ont été déclassées et 10 installations ont bénéficié de dérogations à l’interdiction au titre de la Décision OSPAR 98/3, ce qui signifie que dans des conditions définies, certaines catégories d’installations peuvent être laissées en place, entières ou en partie, sur le fond marin.
Figure 7.4 : Inventaire OSPAR 2019 des installations offshore ; des détails sur l'emplacement et le statut des installations offshore dans la zone maritime OSPAR, ainsi que la profondeur d'eau, l'opérateur, le type d'installation et le poids. Disponible via ODIMS
Substances radioactives
Les besoins de la société en matière d’énergie, de processus industriels, de santé et de bien-être et de sécurité nationale ont donné lieu à des activités humaines passées et présentes qui ont conduit à l’introduction de radionucléides dans le milieu marin. Les activités liées à la production d’énergie (secteur nucléaire) ont entraîné des rejets de radionucléides artificiels, tandis que les activités du secteur pétrolier et gazier ont entraîné le rejet de radionucléides naturels. Les utilisations industrielles, les activités liées à la recherche, aux études et à l'éducation, ainsi que les utilisations médicales, ont également produit des rejets de radionucléides. Des activités militaires, telles que les essais atmosphériques d’armes nucléaires, et d’autres sources, telles que l’accident de Tchernobyl, ont contribué à de nouveaux apports de radionucléides dans le milieu marin.
Les substances radioactives peuvent être nocives et sont très préoccupantes pour le public. Elles sont nocives car elles peuvent avoir des effets génétiques, des effets sur la reproduction, des effets cancérigènes ainsi que des effets aigus chez les organismes vivants (impacts radiologiques) ; elles peuvent donc potentiellement avoir des effets négatifs sur les organismes marins au niveau des populations et nuire à la santé humaine, par exemple en cas de consommation de produits de la mer. Les substances radioactives peuvent être transportées loin des points de rejet et, dans certains cas, le biote marin présente une capacité d’accumulation de niveaux relativement élevés de radionucléides, même si les concentrations environnementales dans l’eau de mer sont faibles. Il peut y avoir des impacts économiques et sociétaux, même si les concentrations restent en deçà de niveaux connus pour causer des impacts radiologiques. Par exemple, les gens peuvent être réticents à fréquenter les zones côtières et à utiliser les équipements et services situés dans ces zones, par crainte d’une exposition à des niveaux de substances radioactives.
Les évaluations d'OSPAR prouvent clairement qu'il y a eu des réductions progressives et substantielles des rejets de radionucléides du secteur nucléaire. Les concentrations environnementales des radionucléides indicateurs du secteur nucléaire sont proches des niveaux historiques ou inférieures à ceux-ci. Les rejets du sous-secteur non nucléaire pétrolier et gazier sont essentiellement restés inchangés ou ont légèrement diminué ; lorsque des rejets d’eau de production ont lieu, c’est essentiellement dans les endroits où la réinjection n'est pas une option envisageable. Ni les concentrations environnementales provenant du secteur nucléaire, ni les concentrations additionnelles modélisées de radionucléides naturels provenant des rejets d’eau de production du sous-secteur pétrolier et gazier, ne devraient avoir d’impact radiologique sur les humains ou sur le milieu marin. Les évaluations effectuées dans le cadre de la Cinquième Évaluation périodique montrent que les Parties contractantes ont réussi à atteindre les objectifs de la Stratégie Substances radioactives pour 2020, et qu'elles ont réalisé des progrès significatifs vers la réalisation du but ultime, qui est de parvenir à des concentrations dans l’environnement qui sont proches des valeurs ambiantes pour les substances radioactives naturelles, et proches de zéro pour les substances radioactives artificielles.
Figure 7.5 : Comparaison des rejets alpha totaux et bêta totaux moyens pour la période de référence 1995-2001 (colonnes noires) et la période d’évaluation 2012-2018 (colonnes grises) pour les différents sous-secteurs nucléaires.
Déchets dans le milieu marin
Les déchets marins (y compris les microplastiques) sont présents dans toute la zone maritime d'OSPAR et on sait qu'ils ont des impacts écologiques importants. On en connaît les effets nocifs suivants sur les animaux marins : l'ingestion de particules de plastique, lorsque les organismes filtreurs ou suspensivores s'alimentent, par consommation de proies exposées à des microplastiques, ou par ingestion directe lorsque les animaux prennent le plastique pour de la nourriture, ce qui provoque des occlusions et des lésions du tube digestif ; l’enchevêtrement, en particulier dans des déchets filamenteux (tels que des boucles, des bandes d’emballage ou des structures de type filet comme les engins de pêche abandonnés) ; l’étouffement d'habitats benthiques ; et la création de substrats durs artificiels. Les déchets flottants peuvent en outre faire fonction de vecteur de contaminants et de biotes, entre autres des microbes et des espèces non indigènes qui peuvent changer ou modifier les assemblages d’espèces.
Les principales sources directes de déchets en mer sont la pêche, l’aquaculture, le transport maritime et la navigation de plaisance. Des déchets marins provenant d’infrastructures offshore (par exemple celles de l’industrie pétrolière et gazière) viennent s'y ajouter. Les principales sources terrestres, directes et indirectes, de déchets marins comprennent les mauvaises pratiques de gestion des déchets, l'ensemble des détritus qui sont jetés, les eaux usées non traitées, les rejets d'eaux de ruissellement et d’eaux pluviales, les boues d’épuration épandues sur les sols, les industries et la construction à terre, le tourisme et les loisirs, la navigation intérieure et l’agriculture, les rivières agissant comme des voies importantes d'introduction de déchets marins dans les eaux côtières. Une estimation approximative des quantités totales de macrodéchets exportées par six fleuves (la Seine, le Rhin, la Meuse, l'Ems, la Weser et la Tamise) vers la Région Mer du Nord au sens large (Région II) est de 10,5 à 220,6 tonnes par an ; il s'agit essentiellement de plastiques.
OSPAR suit les déchets marins de trois différentes manières : 1) en évaluant les quantités et les caractéristiques des déchets rejetés sur les rivages ou déposés sur les plages ; 2) en surveillant les déchets présents sur les fonds marins, afin d’étudier les tendances spatiales et temporelles ; et 3) en analysant les déchets flottants, cette analyse s'appuyant sur deux espèces indicatrices qui les ingèrent fréquemment : les fulmars et les tortues caouannes. Globalement, les niveaux de déchets marins sont encore élevés et des efforts supplémentaires sont nécessaires. Parmi les déchets marins signalés dans toutes les Régions d'OSPAR, ce sont les plastiques qui prédominent. On a en outre signalé la présence de microplastiques dans les sédiments, les eaux de surface, la colonne d’eau et le biote dans la zone maritime d'OSPAR, à différentes concentrations. Les évaluations des indicateurs liés au fond marin indiquent une augmentation des quantités de déchets présentes sur le fond marin dans la Région Mer du Nord au sens large.
Les plastiques à usage unique et les déchets d'origine maritime font souvent partie des déchets rencontrés sur les plages dans l’ensemble de la zone maritime d'OSPAR, avec des différences régionales importantes. On voit néanmoins des signes positifs : il y a eu une diminution des quantités de déchets rencontrées sur les plages d'OSPAR entre 2015 et 2020, et des quantités de déchets flottants en mer du Nord entre 2009 et 2018. Quand on situe ces chiffres dans leur contexte, une tendance à la hausse de la production et de l’utilisation des plastiques en Europe au cours d’une période similaire, cela semble indiquer que des progrès ont été réalisés dans la prévention de l'introduction des plastiques dans le milieu marin.
Dans le même temps, les déchets sont largement répandus sur le fond marin dans la zone maritime d'OSPAR, et ils ont fait l’objet d’une surveillance dans les Régions Mer du Nord au sens large (Région II), Mers celtiques (Région III) et Golfe de Gascogne et côte ibérique (Région IV) ; on voit une prédominance du matériel de pêche et des matières plastiques. Il n’y a pas de tendances bien définies dans les Régions III et IV, cependant la quantité de déchets sur le fond marin dans la Région II semble augmenter légèrement. On a également identifié la présence d'une forte densité de déchets flottants dans la Région IV, en particulier dans le coin sud-est du golfe de Gascogne, comme en témoigne l’ingestion par les fulmars et les tortues de mer, qui se nourrissent en surface.
Les déchets marins exercent une pression sur les services écosystémiques, avec de fortes répercussions sur les aspects économiques et sociaux du bien-être humain. Les déchets, qu’il s’agisse de débris visibles ou de microplastiques, peuvent avoir un impact négatif sur des secteurs économiques tels que le tourisme, la pêche, l’aquaculture, la navigation et l’énergie. Les déchets nuisent aussi aux services culturels et aux services d’agrément qu’offre l’océan, en atténuant la beauté et les moments agréables dont nous font bénéficier le littoral et la mer, et en portant atteinte à notre bien-être psychologique.
Figure 7.6 : Cartes lissées pour la mer du Nord au sens large de la probabilité que les prises contiennent un déchet, de 2012 à 2019. En général, la probabilité qu'une prise contienne un déchet est la plus faible dans le nord-ouest et augmente ensuite le long d'un gradient sud-est. Les composantes spatiales des modèles sont statistiquement significatives (p <0,05) pour toutes les années.
Dragage et immersion
Le dragage et l’immersion ont été réglementés par les Parties contractantes à la Convention OSPAR de 1992, qui autorise l’immersion légale en mer de trois grandes catégories de matériaux, à savoir :
- matériaux de dragage;
- déchets de poisson issus des opérations industrielles de transformation du poisson;
- matières inertes d'origine naturelle, constituées par du matériau géologique solide n'ayant pas subi de traitement chimique.
Depuis la mise en œuvre des lignes directrices originales d'OSPAR concernant l’immersion en mer, les charges de contaminants ont diminué et elles se stabilisent depuis le milieu des années 2000.
Une grande partie des matériaux dragués dans les chenaux de navigation de la zone maritime d'OSPAR ne sont pas contaminés, ou bien ils ne sont que légèrement contaminés par les activités humaines (c’est-à-dire que les niveaux de contaminants sont proches des niveaux ambiants naturels). Cependant, dans certaines zones, les matériaux de dragage sont contaminés à tel point qu’il est nécessaire d'appliquer des contraintes environnementales lors de l’élaboration des options de gestion. Les Parties contractantes d'OSPAR surveillent les charges de contaminants dans les sédiments de dragage qui font l'objet d'une gestion et présentent des comptes rendus détaillés à ce sujet, et elles limitent également l’élimination des matériaux contaminés. Le QSR 2010 a mis en évidence une stabilisation de la tendance à la baisse des concentrations de contaminants dans les matériaux de dragage provenant de la mer du Nord méridionale, une tendance qui s’était maintenue tout au long des années 1990. Au cours de la période de 2008 à 2020, aucune tendance à la hausse ou à la baisse n’a été identifiée dans les quantités de matériaux de dragage immergées ou placées dans la zone maritime d'OSPAR ; on a cependant observé une légère tendance à la baisse des charges de TBT/DBT présentes dans les sédiments de dragage. Les autres charges de contaminants n’ont pas présenté de tendances, confirmant ainsi les conclusions de l’Évaluation intérimaire réalisée par OSPAR en 2017.
Les besoins en matière de dragage pourraient augmenter à l’avenir ; en effet, comme le tonnage des navires augmente, ils ont besoin de chenaux de navigation plus profonds et plus larges, d'autre part l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des tempêtes provoque un remplissage des chenaux et des ports. Il se pourrait qu'une partie de ces matériaux soit utilisée de plus en plus souvent à des fins bénéfiques, en réduisant ainsi la nécessité de les immerger en mer.
Figure 7.7 : Localisation des activités d’immersion ou de placement de déchets ou autres matériaux en 2019. Disponible via ODIMS
Pollution sonore
Les activités humaines en mer génèrent du bruit, une forme de pollution qui entrave aussi la réalisation de l’objectif de parvenir à des mers propres. Les évaluations du bruit anthropique dans la zone maritime d'OSPAR établissent une distinction entre le bruit continu (provenant principalement du transport maritime) et le bruit impulsif (par exemple le bruit produit lors des études sismiques, des explosions et du battage de piles).
Le bruit peut interférer avec l’ouïe ou la physiologie des animaux marins, ou bien perturber leur comportement ou causer des lésions. Les mesures visant à atténuer le bruit impulsif ont produit des résultats, mais les directives internationales sur la réduction du bruit continu semblent avoir eu peu d’effet jusqu’ici. Le bruit lié au transport maritime et le bruit impulsif sont particulièrement intenses dans la Région Mer du Nord au sens large. Cependant, aussi bien pour le bruit impulsif que pour le bruit continu, il n’est pas encore possible de dégager des tendances précises à long terme des niveaux de bruit, y compris des tendances apparues depuis le Bilan de santé 2010 (QSR 2010). OSPAR s’est donc engagée à produire un Plan d’action régional comportant des mesures qui visent à réduire le bruit et à améliorer la surveillance des niveaux de bruit.
Une analyse affinée menée dans la Région II d’OSPAR (Mer du Nord au sens large à l’exclusion de la Manche) donne une idée du bruit continu présent dans cette partie très fréquentée de la zone maritime d'OSPAR. La cartographie du Niveau de dépassement montre que dans la quasi-totalité de la mer du Nord, le bruit lié au transport maritime présente un Niveau de dépassement médian de 6 dB ou plus, le bruit lié au transport maritime présentant un dépassement supérieur à 20 dB se trouvant essentiellement dans la partie sud de la mer du Nord et sur les grands axes maritimes. Dans les zones où le Niveau de dépassement médian est élevé, l'exposition au bruit continu représente un pourcentage élevé du temps, et dans ces zones, le bruit lié au transport maritime peut couvrir les sons naturels. L’analyse du chevauchement des zones où le bruit continu est élevé et des aires marines protégées (AMP) indique le même type de perturbation pour ces aires et pour la partie sud de la mer du Nord où se trouvent la plupart d'entre elles. Ceci suggère que les AMP n’atténuent pas le bruit continu.
( Bruit sous-marin : Évaluation thématique ).
Contrairement à la situation pour le bruit continu total qui est présentée ci-dessus, l’indicateur commun d'OSPAR sur la pression exercée par le bruit impulsif montre une augmentation des nombres de « jours de génération d'impulsions par bloc » dans les cinq Régions d'OSPAR. Cette expression désigne le nombre de jours au cours d’une année civile pendant lesquels des sons impulsifs anthropiques (impulsions) se produisent dans une zone spécifiée (bloc), un concept qui offre une fine résolution à l’échelle régionale. Seuls les sons impulsifs au-dessus d’une intensité minimale sont inclus ; en dessous de ce niveau, le risque d’impact sur les animaux marins est jugé insignifiant.
Malgré ces tendances générales du bruit impulsif, le QSR 2023 fait état d'une certaine réduction de l’exposition au bruit du marsouin commun – une espèce particulièrement vulnérable au bruit impulsif, à la fois en raison de sa distribution dans des zones marines très fréquentées et de son statut de population menacée. Cette diminution de l’exposition au bruit est le résultat de mesures prises pour réduire le bruit causé par les activités de battage. D’autres mesures visant à réduire le bruit impulsif, ainsi que le bruit continu, sont décrites dans l’encadré ci-dessous.
Réduction du bruit
L’Organisation maritime internationale (OMI) a publié des lignes directrices volontaires sur la réduction du bruit provenant des navires de commerce. Il est possible de réduire le bruit lié au transport maritime par des mesures techniques, telles que la conception des coques et des hélices, et par atténuation des vibrations causées par les hélices et les machines. Les mesures opérationnelles comprennent des restrictions spatiales et une réduction de la vitesse de navigation, et bon nombre de ces approches sont adoptées dans les normes nationales pour la gestion du bruit qui ont été mises en place par plusieurs Parties contractantes d'OSPAR. Des limites temporelles applicables par zone, concernant le bruit impulsif, ont été récemment mises en place dans certaines aires assurant la protection de mammifères marins.
Il existe également des mesures techniques pour réduire le bruit impulsif. L’utilisation de rideaux de bulles, d'enveloppes d’isolation et d'amortisseurs de bruits hydroacoustiques fait partie des mesures visant à atténuer les effets néfastes du battage de piles par percussion. Ces mesures réduisent très efficacement les niveaux de bruit impulsif provenant du battage de piles dans la zone maritime d'OSPAR. Dans certaines zones, on peut aussi avoir recours à d'autres méthodes d’installation, plus silencieuses, telles que les fondations utilisant la technologie « suction buckets » et le forage. On peut utiliser des rideaux de bulles pour réduire le bruit produit par la détonation de munitions non explosées, cependant dans la plupart des situations, il ne sera probablement pas possible d'avoir recours à cette méthode. Des technologies plus silencieuses permettant d'éliminer les munitions non explosées présentes sur le fond marin sont disponibles depuis peu sur le marché commercial. Lors des levés géophysiques, le bruit des études sismiques peut être légèrement réduit en modifiant la conception et la configuration des réseaux de canons à air comprimé. Pour parvenir à des réductions importantes, on a besoin de technologies alternatives ; des technologies permettant d'utiliser des vibrateurs marins sont en cours de développement. Des mesures opérationnelles peuvent aussi être prises pour réduire le risque d’effets néfastes du bruit impulsif sur les espèces sensibles ; elles consistent par exemple à utiliser des dispositifs de dissuasion acoustique, à choisir des moments ou des zones d’activité moins critiques (par exemple en évitant les aires d’alimentation, les sites de reproduction ou les voies de migration), à faire appel à des observateurs pour vérifier qu'aucun mammifère marin n'est présent dans la zone concernée, ou à pratiquer une surveillance acoustique pour détecter les animaux qui se trouvent à proximité des opérations.
Pressions exercées par les espèces non indigènes
Les espèces non indigènes (ENI) marines sont des organismes qui apparaissent dans de nouvelles zones en dehors de leur aire de répartition et de leur potentiel de dispersion naturels. Leur introduction est facilitée par des activités humaines telles que le transfert des eaux de ballast des navires, la biosalissure (accumulation d’organismes sur la coque des navires), l’industrie de l’aquaculture, et les voyages sur de longues distances produisant des déchets marins anthropiques. Les espèces dont l'aire de répartition s'étend naturellement ne sont pas prises en considération. Toutefois, les ENI qui se propagent dans des zones voisines par des moyens naturels ou via des transports d’origine humaine après leur introduction primaire sont toujours considérées comme des ENI. Ces organismes, mais pas tous, peuvent devenir envahissants et avoir un impact négatif sur les écosystèmes. Comme elles se retrouvent en compétition pour les ressources et pour l’espace et peuvent s’hybrider avec des espèces indigènes, les espèces envahissantes sont capables d'altérer la composition des populations et des espèces, le potentiel d’adaptation des espèces aux changements environnementaux, les réseaux trophiques, les cycles biogéochimiques et la qualité de l’eau.
Bien que le taux de nouvelles introductions d'ENI dans la zone maritime d'OSPAR semble avoir diminué au cours de la période d’évaluation, la tendance est incertaine en raison d'un manque d'homogénéité des déclarations. Néanmoins, de nombreuses mesures de gestion adoptées depuis le QSR 2010 semblent avoir un effet positif. On ne sait pas si cette situation pourra être maintenue, car les nouvelles introductions provenant de l'aquaculture, des eaux de ballast et de la biosalissure vont probablement continuer, et il sera alors nécessaire de mettre en place des mesures de gestion supplémentaires. Comme on manque de connaissances pour déterminer les ENI qui sont, ou deviendront, envahissantes, et comme il est difficile de lutter contre la propagation des ENI dans le milieu marin, on cherche surtout à prévenir l’introduction des ENI et à les détecter rapidement, afin d'éviter les impacts économiques et sanitaires des invasions.
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