4. Évaluation de l’état de l’Atlantique du Nord-Est
Pourquoi travailler en collaboration ?
L’évaluation du milieu marin à l’échelle de l’Atlantique du Nord-Est nécessite une collaboration des pays, car les frontières nationales n'existent ni pour la vie marine ni pour la pollution. La collaboration pour le Bilan de santé 2023 (QSR 2023) a conduit à une évaluation holistique du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est. Pour réaliser cette évaluation, on applique un cadre conceptuel prenant en compte les Forces motrices, les Activités, les Pressions, l'État, l'Impact et les Réponses (Drivers, Activities, Pressures, State, Impact, Responses (DAPSIR)), afin de mieux comprendre les relations entre les actions des gens et l’environnement. Les Parties contractantes d'OSPAR se sont engagées à travailler ensemble pour fournir la base scientifique nécessaire à des réponses politiques plus efficaces et à une meilleure compréhension des compromis et des synergies. Au fur et à mesure que les « économies bleues » se développeront, les Parties contractantes d'OSPAR seront mieux à même de quantifier et de réduire les risques, et mieux préparées à accroître la résilience de leurs systèmes côtiers et marins au changement climatique et à l’acidification des océans. Ces évaluations décennales facilitent la création de mesures cohérentes à l’échelle régionale pour protéger les espèces et les habitats, fondées sur des politiques harmonisées qui encouragent une gestion écosystémique efficace. À l’avenir, à mesure que les Parties contractantes d'OSPAR deviendront plus dépendantes de mers saines, en raison de l'accroissement de leurs besoins en biens et services maritimes, elles verront l'utilité d'investir pour mieux comprendre les pressions et les impacts, de prendre des mesures pour prévenir ou atténuer ces pressions et impacts, et de collaborer pour améliorer l’état des mers partagées. Le travail en collaboration permet de mettre au point des solutions efficaces aux problèmes identifiés dans la NEAES 2030, que toutes les Parties contractantes se sont engagées à mettre en œuvre.
L’objectif des évaluations fondées sur des données scientifiques
Les connaissances scientifiques constituent la base indispensable à une utilisation durable du milieu marin et, en tant que telles, elles sont au cœur du mandat d’OSPAR. Les évaluations fondées sur des données scientifiques, pour lesquelles on utilise des approches et des indicateurs agréés, permettent un suivi clair et précis des conditions environnementales, des implications de ces conditions pour les sociétés, et de la mesure dans laquelle les réponses de gestion conduisent aux résultats escomptés. Pour assurer le bien-être des populations des Parties contractantes d'OSPAR, il faut impérativement disposer d'écosystèmes marins sains, et cette évaluation périodique est donc essentielle pour connaître la capacité passée, présente et future de leurs mers à fournir des biens et services essentiels. L’évaluation permet aussi de mieux comprendre comment les conditions dans la zone maritime d'OSPAR influencent l’océan mondial et la vie sur la planète, et vice versa.
Les évaluations scientifiques sont au cœur des Bilans de santé entrepris chaque décennie par OSPAR. Le QSR 2023 est un projet collectif ambitieux auquel participe tout le réseau d'OSPAR. Les 16 Parties contractantes à la Convention OSPAR sont les principaux contributeurs ; elles désignent plus de 400 experts pour diriger la réalisation des diverses évaluations qui constituent le fondement scientifique du QSR. Les contributions des observateurs d’OSPAR – qu’il s’agisse d’organisations partenaires intergouvernementales ou d’organisations non gouvernementales dans les domaines de l’économie bleue ou de l’environnement – contribuent à combler les lacunes en matière d’information, un aspect crucial de ce processus d’évaluation et de suivi. Le secrétariat d’OSPAR supervise la coordination du processus.
Les motivations à l'origine du QSR 2023
Les évaluations qui sous-tendent le QSR 2023 ont pour objectif primordial d’élargir la compréhension de l’état de l’Atlantique du Nord-Est et de commencer à mieux cerner combien les mesures de gestion prises par les Parties contractantes ont contribué à son état actuel. Le QSR 2023 éclairera la mise en œuvre de la NEAES 2030 et, pour les Parties contractantes qui sont des États membres de l’UE, de la Directive cadre Stratégie pour le milieu marin (DCSMM) de l’UE. Dans l’Atlantique du Nord-Est, OSPAR fait fonction de plate-forme de coordination pour la mise en œuvre régionale de la DCSMM, qui vise à parvenir à un bon état écologique (BEE) dans les milieux marins européens ; c'est aussi une plate-forme de coordination pour d’autres cadres nationaux. Les caractéristiques d'un BEE sont déterminées par chaque État membre de l’UE à partir de critères, de valeurs seuils et de normes méthodologiques fixés au niveau régional ou au niveau de l’Union européenne. Les zones marines de la Norvège, de l’Islande, du Royaume-Uni, du Groenland et des îles Féroé ne sont pas couvertes par la DCSMM.
Le QSR 2023 réunit plus de 120 évaluations thématiques, évaluations d’indicateurs communs, rapports contributifs et autres évaluations. Bon nombre de ces évaluations de la zone maritime d'OSPAR, avec ses cinq Régions (Eaux arctiques, Mer du Nord au sens large, Mers celtiques, Golfe de Gascogne et côte ibérique, et Atlantique au large) et ses nombreuses sous-régions, sont fondées sur des indicateurs, et leurs conclusions sont liées à des services de données et à des services cartographiques. Ces évaluations couvrent la période de 2009 à 2021, qui s'est écoulée entre le dernier QSR (QSR 2010) et le présent QSR, et contiennent des données produites sur différents laps de temps.
Il faut souvent des années pour déceler les effets de mesures de gestion conçues pour protéger l’Atlantique du Nord-Est, car l’écosystème marin peut mettre beaucoup de temps à répondre à des changements des activités humaines, malgré l'importance potentielle de ceux-ci. En outre, des variations naturelles se produisent continuellement dans tout l’Atlantique du Nord-Est. Dans ce contexte, il est nécessaire de procéder à une évaluation continue, avec des mises à jour régulières, afin de garantir que les décideurs politiques disposent à coup sûr des meilleurs conseils possibles.
Depuis la publication du QSR 2010 , OSPAR a travaillé avec d’autres Conventions sur les mers régionales et avec la Commission européenne pour développer des outils d’évaluation communs et largement applicables ; un grand nombre de nouveaux indicateurs de l’état du milieu marin ont été identifiés et des méthodes d’évaluation ont été élaborées, tandis que d’autres méthodes d’évaluation établies de longue date se sont développées.
Le QSR 2023 s’appuie sur les QSR précédents ainsi que sur l’Évaluation intermédiaire de 2017 , qui ont tous présenté en détail les pressions humaines qui s'exercent sur l’Atlantique du Nord-Est, leurs effets et leurs implications pour la diversité biologique de cette zone marine. Les nombres et les niveaux de participation des groupes d’experts qui ont travaillé sur toutes les évaluations ont considérablement augmenté depuis 2000, date à laquelle OSPAR a tenté pour la première fois de réaliser une évaluation systématique à l’échelle de sa zone maritime. Certains des indicateurs de pression dont les évaluations ont été présentées dans le QSR 2010 ont été affinés pour l’Évaluation intermédiaire de 2017, afin d’inclure une composante régionale significative. De nombreux indicateurs évalués pour le QSR 2023 sont de nouveaux indicateurs, notamment les indicateurs « Prises accessoires de mammifères marins » et « Distribution du bruit impulsif notifié ». Par ailleurs, OSPAR a poursuivi l'élaboration de 31 indicateurs couvrant des thèmes tels que les effets des substances dangereuses, la diversité biologique, les oiseaux de mer et les communautés de poissons (voir « OSPAR agit sur les pressions cumulatives »). OSPAR reconnaît la nécessité d’améliorer continuellement sa capacité à évaluer le milieu marin en utilisant des indicateurs et de faire en sorte que les activités humaines ayant un impact sur l’Atlantique du Nord-Est soient gérées de la manière la plus efficace. Ces évaluations font aussi ressortir les lacunes dans les connaissances. Celles-ci seront répertoriées dans le Programme scientifique d'OSPAR une fois que la mise à jour en cours sera terminée ; les scientifiques seront ainsi incités à mener des recherches qui contribueront à améliorer les futurs QSR.
Évaluations thématiques : appliquer une approche holistique
Le milieu marin est un système complexe. L'étude des composantes des écosystèmes ou des pressions qui les affectent ne peut se faire isolément. Pour comprendre, évaluer et gérer ce système, il faut suivre une approche holistique reconnaissant sa complexité, en tenant compte de la diversité des utilisateurs et des utilisations de ses ressources et en considérant les impacts environnementaux, économiques et sociaux de toutes les activités humaines. Une meilleure compréhension du milieu marin favorise une gestion optimale et une utilisation durable de celui-ci. Cela contribue à garantir que les écosystèmes marins continueront de fournir une gamme de services écosystémiques dont la société pourra profiter. Pour soutenir cette approche globale, une catégorie spécifique d’évaluations a été élaborée et réalisée pour le QSR 2023 : les Évaluations thématiques. Il s’agit d’un nouveau type de produit sous forme d’évaluation, qui a pour but de donner une vue d'ensemble de haut niveau d’une question spécifique, en se fondant sur les conclusions et sur les résultats de plusieurs évaluations sous-jacentes. Il existe 15 Évaluations thématiques, chacune portant sur un différent thème, comme il est indiqué ci-dessous.
Veuillez noter que le contenu des Évaluations thématiques n'est pas disponible en français pour le moment.
Les Évaluations thématiques suivent le cadre DAPSIR (Forces motrices, Activités, Pressions, État, Impacts, Réponses (Drivers, Activities, Pressures, State, Impacts, Responses)) pour décrire, comparer et quantifier ainsi les relations : pour satisfaire les besoins humains de base (« Drivers »), il faut mettre en œuvre des activités (« Activities »), qui engendrent des pressions (« Pressures »), qui peuvent produire des changements de l’état (« State ») du milieu naturel (impact environnemental). Il s’ensuit des impacts sur la fourniture de services écosystémiques (« Impacts »), qui influent eux-mêmes sur les besoins humains de base (« Drivers »). Ces interconnexions nécessitent d’être gérées et encadrées (sous forme de mesures) (« Responses ») (Figure 4.1). La normalisation des termes et définitions des différents éléments du cadre DAPSIR dans toutes les Évaluations thématiques apporte une cohérence, rend le texte plus clair et assure la conformité aux exigences réglementaires.
S’il est clair que les pressions peuvent entraîner des changements dans la fourniture des services écosystémiques, l’inverse est également vrai. Les changements dans la fourniture des services écosystémiques peuvent avoir un impact sur les forces motrices sociétales qui sous-tendent les activités responsables de pressions sur la biodiversité et les composantes écologiques. Le cadre DAPSIR permet donc aussi de mieux comprendre comment les services écosystémiques sont liés aux forces motrices, afin de boucler la boucle du cycle DAPSIR. En comprenant cela, les décideurs sont à même de prendre des mesures pour faire face non seulement aux pressions, mais aussi aux forces motrices qui sont à l'origine de celles-ci.
Comme il est rare que les pressions sur les systèmes marins s'exercent isolément, chaque évaluation thématique réalisée pour le QSR 2023 a également pris en compte les effets cumulatifs des pressions (ainsi que les activités et les forces motrices à l'origine de ces pressions) sur les écosystèmes marins et les services écosystémiques. Pour cinq évaluations thématiques de composantes de la biodiversité (oiseaux de mer, mammifères marins, poissons, habitats benthiques et habitats pélagiques), on a évalué l’importance relative des pressions issues des activités humaines, en termes d’étendue spatiale, de fréquence d’occurrence et de degré d’impact probable, et on a étudié leur impact collectif sur les services écosystémiques ainsi que la façon dont elles interagissent. En intégrant de manière cohérente les nombreuses conclusions dans de multiples évaluations, on obtient l'ensemble de données probantes dont on a besoin pour une gestion holistique efficace du milieu marin. En s'appuyant sur des données probantes pour atténuer efficacement les impacts, on évitera un amoindrissement des services et valeurs écosystémiques dont dépendent les sociétés, même lorsque les utilisations de la zone maritime d'OSPAR s'intensifieront dans le contexte de la future économie bleue. Des réponses efficaces, la prise en compte des effets cumulatifs, et une gestion qui reste fidèle à l’approche écosystémique, permettront aux écosystèmes marins de l’Atlantique du Nord-Est de continuer à fournir des biens et services précieux au cours des années à venir.
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